par Nathalie DeBlois, commisaire
Catalogue de la Biennale, p.78-79
L'élément générateur du travail de Gwënael Bélanger est la simplicité inhérente aux choses. Tout se passe dans son œuvre comme si la « blanche réalité », le banal, le commun cachaient quelque noyau dur de signification en attente d’être dévoilé. Ce travail impose, non sans une pointe d’ironie, une remise en question de ce qui s’offre à nous au premier coup d'œil.
Avec la série d’affiches Questions de goût , l’artiste s’intéresse aux procédés et aux mécanismes qui influencent la réception d’une image. Utilisant la stratégie de la réclame publicitaire – dont l’objectif premier vise l’acte de consommation – , Bélanger convoque le citoyen à un jeu au sein duquel il est à la fois joueur et instrument du jeu.
Questions de goût ne propose ni la satisfaction d’un besoin ni la perspective d’un avenir meilleur. Au contraire, ces affiches retournent comme un gant la tactique publicitaire en renvoyant l’individu à sa propre conscience : Pourquoi préfère-t-on telle chose à une autre ? Comment départage-t-on plusieurs choses qui nous sont proposées ? Qu'est-ce qui fait qu'une chose semble plus parfaite qu'une autre ? Tous en soulignant la complexité de la relation entre l'image et sa réception, cette œuvre mène à l’épineuse question de la validité du jugement esthétique.
Dans un autre ordre d’idées, les séries photographiques de Bélanger présentent divers objets en chute libre, suivant leur descente à travers une succession d’images, jusqu’au moment critique de leur impact sur le sol. Selon leur nature, ces objets rebondiront, se tordront, s'aplatiront, se disloqueront ou éclateront en mille morceaux. Mais l'observateur, n'ayant pas droit au spectacle du choc contre le sol, devra combler par lui-même, en esprit, le vide laissé par ces images. Suscitant à la fois les sentiments d’excitation, d’indignation et de défoulement, les séries Chutes nous reportent à la désinvolture avec laquelle l’être contemporain dispose de ce qu’il juge démodé, vétuste, sans valeur.